Sur les réseaux sociaux, les représentants de la nouvelle génération soutiennent les mesures chocs annoncées par le chef de l’État tunisien. Mais leur appui n’est pas inconditionnel.
Fort de son slogan « le peuple veut », le président tunisien, Kaïs Saïed, avait largement été porté à Carthage par des groupes de jeunes mobilisés autour de sa campagne de 2019. L’ex-assistant universitaire en droit constitutionnel s’était en effet attaché le soutien de nombreux étudiants, mais aussi de jeunes actifs et de chômeurs, en assurant que « les jeunes ont leur programme ». Une partie de cette base électorale avait beau être dépourvue de bagage politique, elle a pour point commun de s’être construite dans le sillage d’une révolution dont elle a hérité, bon gré mal gré.
« Le président a bien saisi le ras-le-bol d’une population arrivée à saturation, et encore plus chez les jeunes, analyse le sociologue et ancien directeur de l’Observatoire de la Jeunesse, Mohamed Jouili. Les jeunes sont tellement habitués au bla-bla des politiques que nous sommes arrivés au point où beaucoup considèrent que les réseaux informels leur apportent plus de réponses que l’État. »
Selon un sondage d’Emrhod Consulting, 87 % des Tunisiens approuveraient les décisions présidentielles. Couronné de son aura d’indépendant, face à la lassitude et aux frustrations plus que jamais associées aux partis existants, Kaïs Saïed continue depuis ses annonces du 25 juillet dernier d’être porté aux nues, en particulier par des représentants de la jeunesse du pays.
Car derrière un « peuple » aux contours vaporeux et dont il se prétend toujours le porte-voix, le chef de l’État sait s’adresser à une classe d’âge pour qui l’horizon reste opaque en pleine transition démocratique inachevée. De surcroît, dans un contexte de crise économique doublé d’une crise politique et sanitaire.
Le remède de l’action
Ses décisions de geler les travaux de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) pour trente jours, de destituer le chef du gouvernement, le ministre de la Défense et celui de la Justice par intérim, mais aussi de lancer des poursuites contre des élus, continuent de séduire cette frange de la population, avide d’actes concrets face aux vaines promesses. Parmi eux, figurent d’anciens acteurs de sa campagne, comme Fares Mejri, pharmacien de 32 ans, qui avait fait partie du convoi du candidat Saïed dans les vingt-quatre gouvernorats du pays.
à lire Tunisie : « Kaïs Saïed n’a pas agi dans le strict respect de la Constitution »