Tous les indicateurs devraient fortement se dégrader en 2020 à cause de la crise sanitaire et des mesures des autorités, avant de se redresser en 2021.
Plus sombres qu’en juin dernier, les nouvelles prévisions macroéconomiques pour le Maroc prévoient une récession plus brutale pour 2020 à cause de la crise sanitaire. L’économie du pays devrait se contracter de 6,3 %, et non de 5,2 % comme la banque centrale marocaine l’avait annoncé, en raison d’un « redémarrage plus lent que prévu » face à la pandémie. Des prévisions amenées à évoluer tant la situation est encore incertaine.
Un redémarrage plus lent de l’activité économique
Trois motifs expliquent ces prévisions : le redémarrage plus lent que prévu de l’activité économique, mais aussi des restrictions localisées décidées par les autorités et le maintien des frontières fermées. Mais, alors que, l’an dernier, le Maroc avait enregistré un taux de croissance de 1,5 % du fait d’une mauvaise pluviométrie, cette année, aucune amélioration n’est en vue. Le secteur agricole devrait connaître un recul de 5,3 %, le pays souffrant toujours d’une sécheresse exceptionnelle. L’agriculture est le premier secteur contribuant au PIB, devant le tourisme et l’industrie.
Les secteurs non agricoles devraient reculer de 6,3 %, notamment en raison de « la fermeture quasi totale des frontières pour les voyageurs », le tourisme figurant parmi les secteurs les plus touchés, selon la Bank Al-Maghrib (BAM).
Pour 2021, la BAM espère voir le PIB rebondir et prévoit une croissance de 4,7 %, contre 4,2 % en juin, mais souligne que les perspectives « restent entourées d’un niveau exceptionnellement élevé d’incertitudes liées notamment à l’évolution de la pandémie » de Covid-19. Pour financer l’aggravation du déficit budgétaire, le Trésor va, entre autres, procéder à une sortie sur le marché financier international dans les prochains jours et une deuxième en 2021. La sortie de cette année sera en euros et sera prise en compte dans les réserves de la banque. Pour le gouverneur de la banque centrale marocaine, Abdellatif Jouahri, il ne fait aucun doute que, « si les autorités sont amenées à prendre ces mesures, c’est parce que les gens ne sont pas disciplinés. La majorité des cas de contamination sont des cas contacts, et cela montre que toujours il y a quelqu’un qui ne respecte pas les mesures de précaution et favorise les contaminations. À chaque occasion, Aid, Achoura, il y a un relâchement nuisible sur le plan économique ». Et d’ajouter : « Je me mets à la place du gouvernement : choisir entre la mort de l’économie et la mort à cause du Covid, le choix n’est pas du tout facile. »
Deuxième pays le plus touché du continent
Pour tenter de contenir la propagation du nouveau coronavirus, les autorités ont multiplié ces derniers jours les mesures de restriction dans plusieurs villes, avec notamment un couvre-feu à Casablanca, la capitale économique du pays. En effet, en quelques semaines seulement, le royaume chérifien a accumulé les cas de contamination depuis la sortie d’un confinement généralisé de près de trois mois.
Le Maroc vient de dépasser l’Égypte, l’Éthiopie et le Nigeria en termes de cas de covid-19, des pays pourtant trois fois plus peuplés que le royaume. Résultat : il est devenu le deuxième pays le plus touché du continent derrière l’Afrique du Sud.
Cette situation pandémique met à rude épreuve les responsables marocains. Les frontières du pays ont été fermées mi-mars, avec la déclaration de l’état d’urgence sanitaire. Aussi, les recettes du secteur touristique, un des piliers de l’économie marocaine, ont pratiquement chuté de moitié (- 44,1 %) sur les sept premiers mois de l’année, selon la Direction des études et des prévisions financières (DEPF) citée par l’agence officielle MAP.
Le taux de chômage est passé de 8,1 à 12,3 % au deuxième trimestre et le taux d’activité a reculé de 45,8 à 44,8 %, selon les statistiques officielles publiées par le haut-commissariat au Plan (HCP).
Avec le ralentissement mondial de l’industrie automobile, les exportations pourraient chuter de 16,6 % en 2020, selon les prévisions de la BAM, avant d’augmenter de 22,4 % en 2021 grâce à une reprise du secteur automobile.
Dans ces conditions, la banque centrale s’attend à voir le déficit du compte courant se creuser à 6 % du PIB en 2020, au lieu des 10,3 % prévus juin, et revenir à 5,2 % du PIB en 2021.