Le Conseil d’État a validé, ce mardi 30 août, l’expulsion vers le Maroc de l’imam Hassan Iquioussen. Cette mesure ayant un effet exécutoire, le prédicateur devra quitter rapidement le territoire français.
Très attendue, la décision du Conseil d’État est finalement tombée, mardi 30 août, aux alentours de 15h00 : Hassan Iquioussen, un imam de 58 ans originaire du Nord de la France, et accusé par les autorités nationales de tenir depuis plusieurs années des propos antisémites, sexistes et homophobes, devra finalement quitter le territoire français.
Le 29 juillet, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, avait lancé une procédure d’expulsion à l’encontre du prédicateur qui a connu plusieurs rebondissements durant l’été. Sur Twitter, le ministre a aussitôt salué la décision de la plus haute juridiction administrative française. « Le Conseil d’État valide l’expulsion de M. Iquioussen qui tient et propage notamment des propos antisémites et contraires à l’égalité entre les femmes et les hommes. C’est une grande victoire pour la République. Il sera expulsé du territoire national », a tweeté l’ancien maire de la ville nordiste de Tourcoing.
Clivage
Cette affaire n’en finissait plus de cliver la classe politique française, les membres de la majorité présidentielle continuant de faire bloc derrière la décision du ministre de l’Intérieur, tandis qu’une partie de la gauche s’y était opposée. Le député La France Insoumise Manuel Bompard avait notamment déclaré que lui et son parti condamnaient les propos de l’imam, tout en défendant les « principes de l’État de droit et de l’indépendance de la justice vis-à-vis du pouvoir exécutif ». Le 28 août, c’était au tour d’Olivier Véran, ancien ministre de la Santé et actuel porte-parole du gouvernement, de déclarer que le « refus du Conseil d’État d’expulser Hassan Iquioussen serait un mauvais signal ».
Pour rappel, Hassan Iquioussen avait été contraint par son père de renoncer à sa nationalité française lorsqu’il était âgé de 16 ans. Il n’était par la suite jamais parvenu à la récupérer malgré plusieurs tentatives. Et puisque le Maroc avait accepté de délivrer un laissez-passer consulaire afin de pouvoir l’accueillir sur son territoire le cas échéant, il était donc considéré comme « expulsable ».
Le ministre, qui s’était personnellement investi sur le cas du prédicateur, avait vu sa demande d’expulsion suspendue par le juge des référés du tribunal administratif de Paris le 5 août, ce dernier estimant que la mesure constituait une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale de l’intéressé. Gérald Darmanin avait alors annoncé qu’il ferait appel devant le Conseil d’État, qui a accédé à sa demande.
Pour justifier sa décision d’avaliser l’expulsion de l’imam, la juridiction a notamment expliqué que « ses propos antisémites, tenus depuis plusieurs années lors de nombreuses conférences largement diffusées, ainsi que son discours sur l’infériorité de la femme et sa soumission à l’homme constituent des actes de provocation explicite et délibérée à la discrimination ou à la haine justifiant la décision d’expulsion ».
Par ailleurs, et bien que le Conseil d’État ait désavoué Gérald Darmanin sur « plusieurs motifs retenus par le ministre pour expulser M. Iquioussen », il n’en a pas moins estimé que les propos antisémites tenus en 2004 et réitérés en 2015 par l’intéressé « constituent des actes de provocation explicite et délibérée à la discrimination ou à la haine contre une personne déterminée ou un groupe de personnes justifiant une expulsion en application de l’article L. 631-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ».
La CEDH, l’ultime recours
Hassan Iquioussen avait notamment qualifié au cours d’une conférence les juifs d’« avares » et d’« ingrats », et évoqué, en 2014, l’existence d’un « complot juif » pour « profiter du pétrole des pays arabes ». Des déclarations pour lesquelles, toujours selon le Conseil d’État, il n’aurait présenté ses « excuses » que tardivement et uniquement « en réaction à l’émotion que ses propos avaient suscitée et sans réfuter de manière explicite ces propos ».
S’il est à présent contraint de quitter la France, la défense d’Hassan Iquioussen pourra effectuer un ultime recours devant la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH). Mais en attendant, se rendra-t-il effectivement dans son pays d’origine, le Maroc, avec lequel il n’a presque aucun lien ?
« Certainement pas », affirme-t-on dans son entourage. Avant la suspension de son expulsion par le tribunal administratif de Paris, la piste belge avait déjà été évoquée.