À la veille d’un rassemblement de soutien à Paris et Bamako, sa compagne se confie à TF1 sur le profil de celui qui aspire à “donner la parole à ceux qu’on n’entend pas”.
Deux mois maintenant qu’Olivier Dubois a disparu au Mali, début avril. Il était ensuite réapparu le 5 mai dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux dans laquelle il expliquait avoir été enlevé. Une version confirmée par le ministre des Affaires étrangères le 23 mai, Jean-Yves Le Drian déclarant alors que “tout nous laisse à penser” que le journaliste “est otage d’un groupe djihadiste”.
Sa compagne, Déborah, s’est confiée à TF1, notamment sur les conditions qui ont amené Olivier Dubois à se rendre de sa propre initiative à Gao en vue d’un entretien avec Abdallah Ag Albakaye, commandant d’un groupe du GSIM (Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans, un groupe djihadiste, ndlr) dans la zone de Talataye, à environ 150 km de Gao.
L’enlèvement du journaliste français Olivier Dubois au Mali
Le Français d’origine martiniquaise, âgé de 46 ans, “est installé au Mali depuis six ans”, précise d’abord Déborah, ajoutant que “ce qui le motive le plus, c’est son amour pour le Mali. Il a vraiment l’impression que son travail peut amener à des réflexions, à faire changer les choses.” C’est aussi pour cette raison que le quarantenaire “avait décidé de développer cet aspect de terrain en allant notamment au Pays Dogon”. Au début du mois d’avril, il avait d’ailleurs publié dans Le Point Afrique une interview de Youssouf Toloba, chef de Dan Na Ambassagou, une organisation autonome qui combat les djihadistes en Pays dogon. “C’est un journaliste très humain qui a toujours une volonté de parler des choses dont on ne parle pas au Mali, de donner la parole à ceux qu’on n’entend pas”, souligne sa compagne.
Selon elle, le reporter indépendant, qui a notamment couvert la tourmente sécuritaire traversée par le pays sahélien pour différents médias, comme depuis un an le quotidien Libération, “voulait être au plus proche de l’information.” Car “on peut tous avoir des informations au travers d’un réseau, mais rien ne vaut le travail de terrain, de se déplacer et de parler aux acteurs. Et Olivier veut toujours être au plus proche des acteurs locaux, c’est comme ça qu’il est parti à Gao.”
L’ambassade de France connait très bien Olivier- Déborah, la compagne d’Olivier Dubois
Pour autant, le journaliste, qui “a tissé un réseau fiable au fil des années, ne travaillait qu’avec des personnes de confiance. (…) Il ne se déplace jamais s’il ne maîtrise pas parfaitement la situation locale et les enjeux”, poursuit sa compagne, soulignant que “l’ambassade de France connait très bien Olivier, son travail, ses déplacements, sa façon de travailler.”
D’ailleurs, “pour ce déplacement, Olivier a envoyé un message WhatsApp à l’ambassade pour les prévenir de son déplacement. Ils lui ont répondu par WhatsApp qu’ils le déconseillaient fortement. Il n’y a pas eu d’appel. Je sais qu’ils ont envoyé une lettre rouge à Olivier, mais il était déjà à Gao, il ne l’a jamais reçue”, explique aussi Déborah.
Désormais, cette dernière pilote le comité de soutien, par lequel a été “mis en place une présence sur les réseaux sociaux.” Un comité “composé de gens qui aiment Olivier” et qui “s’organise très simplement : on a une équipe au Mali, une équipe en France, avec deux portes-paroles.” “On est en train d’organiser, avec Reporter Sans Frontières, un rassemblement pour les deux mois de sa captivité. Il y aura un simultané en France et à Bamako*”, indique aussi la compagne d’Olivier Dubois à l’approche de l’événement, organisé ce mardi matin.
“Je fais entièrement confiance aux autorités maliennes et françaises et à leurs capacités à amener à des discussions par des voies diplomatiques”, assure-t-elle également, précisant que “la France et le Mali n’ont jamais cessé de [lui] apporter leur soutien et de [lui] montrer leur intérêt par rapport à la situation d’Olivier.”
Pour autant, Déborah “se sent à la fois très forte (…) mais aussi démunie” car “le manque est très dur à supporter.” “Olivier ne quitte jamais mon esprit ni mon cœur”, dit-elle aussi, expliquant qu’elle “essaye quand même de continuer de rire parce que c’est important, surtout pour les enfants. Mais c’est davantage un masque que l’on porte au quotidien.” “Ma vie a profondément changé, elle n’est plus comme avant, mais ce n’est pas grave. Je sais qu’elle le sera de nouveau quand Olivier reviendra”.