Depuis avril 2021 les actes de piraterie en mer dans le golfe de Guinée ont continué de diminuer, mais il est trop tôt pour en tirer la conclusion du déclin inexorable de ce fléau, a déclaré mardi une haute responsable de l’ONU au Conseil de sécurité.
La Sous-Secrétaire générale pour l’Afrique, Martha Ama Akyaa Pobee, a précisé que cette piraterie rapporte chaque année près de 2 milliards de dollars aux réseaux criminels impliqués.
« Davantage de patrouilles navales des États côtiers et le déploiement accru de navires par des partenaires internationaux ont été dissuasifs », a-t-elle expliqué, ajoutant que deux condamnations d’auteurs d’actes de piraterie et de vols au Nigéria et au Togo avaient également compté.
Appelant néanmoins à la vigilance, Mme Pobee a précisé l’évolution d’une menace, décrivant le passage de groupes de pirates au vol de pétrole, « une pratique moins risquée et plus profitable ».
Le Code de Yaoundé
Dans ce contexte changeant, elle a appelé les Communautés économiques des États de l’Afrique centrale (CEEAC) et de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ainsi que la Commission du golfe de Guinée à renforcer leur coopération pour mettre en place l’environnement sécurisé dans la région prévu par le Code de conduite, dit « Code de Yaoundé », qui fêtera ses 10 ans l’an prochain.
L’adoption de ce code de conduite a débouché sur la création d’un mécanisme interrégional de sûreté maritime, appelé l’architecture de Yaoundé, visant à optimiser la coopération maritime dans l’ensemble du golfe de Guinée.
La Secrétaire exécutive de la Commission du golfe de Guinée, Florentina Adenike Ukonga, a attiré l’attention sur le rôle, dans l’obtention des bons résultats obtenus ces derniers mois, du Centre interrégional de coordination pour la mise en œuvre de la Stratégie régionale de sécurité et de sûreté maritimes en Afrique centrale et de l’Ouest.
Au plan sécuritaire, la coopération entre le Centre et l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) a été salué par la Directrice exécutive de l’Office, Ghada Fathi Wali.
Citant des raisons qui ont conduit au déclin de la piraterie maritime, comme la volonté politique manifeste des gouvernements de la région, un meilleur financement des agences maritimes, les plaidoyers actifs des organisations régionales, l’application de lois pénalisant la piraterie et les crimes commis en mer ou encore la coopération avec l’Union européenne (UE), Mme Wali s’est toutefois refusée à crier victoire.
Elle a plutôt souligné la nécessité de profiter de l’élan actuel pour octroyer davantage de ressources à l’architecture de Yaoundé, y compris par le biais d’une assistance logistique et juridique accrue aux pays touchés.
Coopération sur le terrain
Les représentants de l’Union africaine et l’Union européenne ont exposé certaines des modalités de la coopération des organisations régionales sur le terrain.
Rappelant la mise en œuvre du concept pilote de présence maritime coordonnée de l’UE dans le golfe de Guinée en janvier 2022, Nura Abdullahi Yakubu, responsable de la planification maritime pour l’Union africaine, a indiqué qu’actuellement le Danemark, l’Espagne, la France, l’Italie et le Portugal participent à ce dispositif en engageant des ressources navales destinées notamment à maintenir « au moins un navire en permanence dans la région ».
Silvio Gonzato, de l’Union européenne, a en outre annoncé que l’Union envisage une mesure d’assistance dans le cadre de la Facilité européenne pour la paix « afin de soutenir les acteurs militaires dans certains États côtiers ».
Mme Pobee a également mentionné que, pas plus tard que le mois dernier, des exercices maritimes de lutte contre la piraterie et la pêche illégale avaient couvert la zone allant du Sénégal à l’Angola, faisant participer 17 pays du golfe de Guinée et 8 partenaires internationaux.
Mme Pobee a attiré l’attention sur l’importance de lutter contre les causes sous-jacentes du basculement dans la criminalité, comme le chômage de masse qui frappe la jeunesse des communautés côtières.
Saluant les efforts entrepris par les pays d’Afrique centrale pour développer une « économie bleue » dans l’espace de la CEEAC, elle a noté que l’ONU et la Banque mondiale renforcent leur coopération pour contrer les facteurs de précarité et améliorer l’accès aux services publics de base de ces communautés.
La Sous-Secrétaire générale a en outre insisté sur le fait que la lutte contre la piraterie et les vols à main armée en mer dans le golfe de Guinée « nécessite une approche globale et à long terme similaire au cadre de réalisation des objectifs de développement durable ».