Depuis quelques mois, il semblerait que l’on assiste à une intensification de la coopération entre les pays riverains du Sahel, alors que « Al Qaida au Maghreb Islamique » (AQMI) prendrait de l’avis de plusieurs spécialistes,une orientation de plus en plus mafieuse.
En effet, des groupes intermédiaires de brigands sahéliens, qui n’avaient jusque là aucune orientation religieuse, auraient des contacts de plus en plus resserrés avec les affiliés d’AQMI, sous-traitant pour eux un certain nombre d’actions, ou bien leur revendant par exemple des ressortissants étrangers enlevés sur la zone. Ce virage, où le grand banditisme effectue une alliance objective avec le terrorisme islamiste, est, selon de nombreux experts, le pire scénario envisageable pour l’arc sahélien, car cela rendrait l’identification des groupes réellement liés à AQMI des autres beaucoup plus difficile, alors que tout l’enjeu consiste précisément à améliorer les capacités d’identification. De surcroit, il est désormais avéré que des courroies de transmissions discrètes, mais efficaces, se sont établies entre des cartels sud-américains spécialisés dans le commerce de cocaïne, et certains groupes affiliés à AQMI, qui se sont reconvertis dans le narcotrafic suite à la baisse de « rentabilité » de l’immigration clandestine et de la contrebande , jusqu’alors principale source de financement des groupes armés affiliés à Al Qaida. En effet, sous le double coup de la baisse des barrières douanières de part le monde-qui diminue la valeur des marchandises de contrebande- ainsi que le durcissement des politiques de lutte contre l’immigration clandestine de la part des pays d’Europe-crise financière accélérant le processus- les groupes armés positionnés dans le Sahel se sont logiquement tournés vers le narcotrafic. Ce partenariat « gagnant-gagnant » a eu pour effet d’accroitre les transferts de « savoir-faire » et de matériel entre les entités , les cartels colombiens, par exemple, fournissant des armes et de la technologie de télécommunication sophistiqués à AQMI, le groupe terroriste se chargeant d’acheminer la drogue aux abords de l’Europe. La D.E.A américaine ne s’y est d’ailleurs pas trompée, et mène depuis plusieurs années un combat sans merci à l’encontre des trafiquants du Golfe de Guinée, apportant son savoir-faire aux hommes de la C.I.A stationnés sur place, qui n’étaient pas jusqu’alors très enclins à traiter els questions liées au narcotrafic. L’enjeu est capital, car le mouvement auquel l’on assiste récemment de coordination de la lutte contre AQMI reste très insuffisant eu égard aux enjeux. En effet, même si une opération d’envergure « imminente » est régulièrement annoncée, la structure même d’AQMI, sorte de groupement hétéroclite de bandes plus ou moins hiérarchisées fait qu’une coordination sans faille est requise pour pouvoir obtenir des résultats. Le combat à mener requiert énormément de temps, ainsi que des moyens militaires conséquents –notamment en termes de forces aériennes- pour couvrir l’ensemble des étendues pouvant servir de refuge aux groupes armés. Egalement, la question de la résilience des maquis de Tizi Ouzou et de Boumerdès au centre de l’Algérie, traditionnellement utilisés par AQMI comme zones-refuge doit être posée à l’aune des capacités opérationnelles de l’Armée algérienne de mener une opération d’envergure afin de sécuriser ces périmètres. Or, la question du partage du renseignement entre les différents protagonistes constitue aujourd’hui un écueil quasi-insurmontable, et un défi qu’il est absolument nécessaire de surmonter pour pouvoir mener une guerre efficace contre des groupes qui ignorent les frontières et les rivalités des Etats. Egalement , la situation de la Guinée Bissau et de la Guinée Conakry constituent des sources d’inquiétude pour les spécialistes militaires , qui estiment que l’on pourrait, à court terme, assister à une migration des zones de repos des groupes terroristes d’AQMI vers ces pays à l’exécutif très faible, où l’Etat contrôle de moins en moins le territoire.